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Nous avions commencé cette radio en vous faisant écouter Andy’s gone de Marie-Claude Verdier, adaptation contemporaine d’Antigone et je ne savais pas que quelques semaines plus tard, Jean Varela utiliserait ce personnage pour annoncer l’annulation du festival. Oui, il faut du silence pour entendre les mots et pour se recueillir.
Mais voilà déjà deux mois que nous écoutons le silence sur les plateaux de théâtre, les écrans de cinéma, les salles de concert et il commence à être assourdissant, ce silence.
Ce silence si étranger à notre société, si étranger même à la nature. ça aussi nous avons pu le remarquer ces dernières semaines.
Le silence n’existe pas.
Le silence est une fabrication, une création de l’homme.
Si vous entendez un silence à la radio, vous imaginerez tout de suite qu’il y a un problème technique. Si bien que le silence à la radio est interdit et qu’un message automatique se met en route au bout de dix secondes de silence.
Au théâtre vous l’accepteriez s’il n’est pas trop long mais ce n’est pas un vrai silence. Seulement un silence qui vous reconduit sur les rives du réel, un silence absurde qui ne répond pas à nos attentes de spectateurs, à nos questions sur
le monde.
Chacun ensuite aura sa résistance au silence.
Certains commenceront à tousser alors qu’ils n’avaient pas mal à la gorge, d’autres se trémousseront sur leur fauteuil ou d’autres encore accepteront le silence par le sommeil.
Et pourtant dans les théâtres nous le réclamons.
Notre cérémonie doit commencer par le silence.
Et celui qui ne le respecte pas est souvent vilipendé par les autres spectateurs.
Parce que Faire silence c’est se mettre en état de disponibilité.
Mais aussi en état de vulnérabilité.
C’est un saut dans le vide où nous devons accepter notre nudité, notre ignorance devant ce qui va nous arriver.
Nous nous méfions du silence car il annonce l’inconnu qui vient.
Encore plus au théâtre
Le silence est un trou, une béance que longtemps le théâtre a voulu prévenir en s’assurant de la présence d ‘un souffleur.
Le silence est un langage aussi que des générations d’artistes ont apprivoisé avec l’art de la Pantomime.
La puissance du silence étant de solliciter le regard, d’inquiéter le regard, de le mettre en état d’urgence.
Le silence est assourdissant quand il tait.
Quand il tait les cris. Quand il tait la misère.
Le silence est indigne quand il empêche de nommer.
Mais encore une fois, le silence est une construction de l’homme.
Et il ne suffit pas de conjurer le silence pour dire quelque chose.
Le silence c’est aussi un souffle, c’est ce qui permet de rendre audible la parole, de se donner le temps de la réflexion, ce retrait indispensable pour regarder en soi.
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Vous avez entendu des souvenirs de Jean et Karin
Des commentaires de Florence March et Gerard Liéber
Avec Camille Soulerin, Alex Jacob, Vanessa Liautey, Nadia Sefad, Jean-Christophe Sirven, Béla Czupon, Hélène De Bissy, Sarah Fourage, Alex Selmane et Sacha Guitry.
Musique de Jean Christophe Sirven et Éric Guennou
Réalisation : Julien Bouffier
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